Je rêve de m’initier à l’apnée depuis des mois. Je ne pouvais pas rêver meilleur contexte que le stage Immersion entre Terre et Mer auquel j’ai participé début mai 2024, proposé par Maëva fondatrice d'Odenzia et Marine Grosjean, ancienne championne de monopalme 6km et instructrice d’apnée à Lanzarote.
Depuis la côte, je ressentais une envie profonde de percer la surface, cette frontière qui nous sépare d’un univers inconnu pour voir ce qui se trame dans cet autre monde. Je devinais déjà que la mer avait beaucoup de mystères et de trésors à m’offrir. Mon intuition était juste.
Lanzarote, avec son paysage volcanique et son énergie unique, a été le cadre parfait pour cette découverte. L'île elle-même semble incarner la dualité retrouvée dans la pratique de l’apnée, entre force et sérénité, entre rudesse et douceur. Les petites maisons blanches contrastant avec la roche volcanique noire ajoutent à cette impression d'un lieu hors du temps, propice à l'introspection et à la transformation.
Le stage s'est déroulé par étapes : d'abord l'apnée statique en piscine, puis dynamique en apprenant à palmer, et enfin l'apnée au câble en mer. Chaque étape nous a permis de nous familiariser progressivement avec les sensations uniques de cette discipline.
L’apnée est l’art du relâchement et de la lenteur. Plus qu’une discipline sportive, c’est un véritable voyage intérieur, qui nous invite à l’humilité, à reconnaître et accepter nos limites tout en les repoussant avec douceur.
Marine, notre initiatrice, a partagé avec nous son propre parcours. Elle a admis avoir mis cinq ans avant de pouvoir descendre à plus de cinq mètres au câble. Elle n'arrivait pas à compenser, ce qui consiste à rétablir le volume d’air dans les oreilles afin de réguler la pression de l’eau sur les tympans. Son passif de compétitrice et les enjeux de performance qui y sont liés l'entravaient. C'est finalement en retrouvant la notion de jeu à travers le snorkeling, et en reconnectant avec son âme d'enfant, qu'elle a pu dépasser ce blocage et plonger plus profond. Et c’est exactement ce que j’ai vécu lors de ces quelques jours d’initiation : une difficulté à compenser et à descendre en profondeur le long du câble, mais plus de facilité en snorkeling, lorsqu’il s’agissait de jouer à être une exploratrice des fonds marins. Je n’ai pas encore le statut de sirène, mais après avoir expérimenté la monopalme, j’étais à deux doigts de tout plaquer pour devenir Ariel et vivre avec les poissons, les poulpes et les crustacés.
S’il y a bien une leçon que j’ai tirée de toute cette expérience, c’est qu’on ne peut absolument pas mentir avec l’apnée. Si le corps est tendu ou l’esprit agité, cela se reflète immédiatement dans notre capacité à retenir notre souffle et à descendre en profondeur. L’apnée m’a mise face à mon état émotionnel du moment et j’ai dû humblement écouter ce qui se jouait à l’intérieur.
En revanche, j’ai aussi pu expérimenter l’effet tant convoité par les apnéistes: une profonde détente. Le processus physiologique en cause est très bien identifié et est appelé le diving reflex, ou le réflexe d’immersion. Lorsque l’on plonge notre visage dans l’eau, le corps se prépare à l’hypoxie en ralentissant son rythme cardiaque. Grâce à cette bradycardie, il va être possible d’économiser l’oxygène. Le phénomène, ensuite majoré par l’arrêt de la ventilation, a un effet secondaire : il induit un apaisement rapide. Après une série d’exercices d’apnée statique en piscine guidés par Marine, je me suis surprise à tenir 3 minutes. Concentrée sur mes sensations, je sentais mon rythme cardiaque ralentir et dans le même temps, une détente s’installer. Cette détente peut perdurer longtemps après l’immersion. Pendant ces 4 jours, après chaque plongée, j’étais comme “shootée”, planante, et je touchais du doigt l’état que tant d’apnéistes recherchent.
Plonger dans les profondeurs de l'océan est une expérience unique et révélatrice. C'est un retour à l'essentiel, une reconnexion avec notre nature profonde. Dans l’immensité du grand bleu, seul l’instant présent compte. Après ces quelques jours, je suis intimement convaincue du pouvoir guérisseur de l’eau. Je me suis immergée le cœur lourd, et j’ai refait surface le cœur plus léger.
En définitive, l’apnée nous enseigne la patience et la persévérance et nous rappelle que la véritable force réside dans la capacité à lâcher prise et à se laisser porter par le courant de la vie.
Je sens et je sais que ce n’est que le début d’un long apprentissage.
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